Les lecteurs assidus de Café Gaming se souviennent sans doute d’un billet d’humeur écrit il y a bientôt un an, dans lequel j’étais particulièrement critique avec le salon Paris Games Week, et son principal instigateur, Jean-Claude Larue (délégué général du SELL). Ce qui n’était qu’un simple billet d’humeur sur un blog de peu d’influence a rapidement été retweeté à outrance, a grimpé dans Google, bref, il a pris en buzz.
À l’approche du PGW édition 2011, Jean-Claude Larue a souhaité me rencontrer. Petite surprise de ma part, mais rendez-vous pris tout de même ; et voilà comment, il y a quelques jours, je me retrouvais face à face avec celui dont je tançais vertement la politique à la terrasse d’un café. L’occasion de vous proposer un petit résumé de la rencontre, sans prétention, ainsi que mes premières réflexions sur le PGW cette année…
Grande gueule, Larue l’est assurément. Cela se sent dès les premières minutes. Le verbe est rapide et maîtrisé, le langage utilisé d’un registre familier ; on est loin de la langue de bois si chère à nos politiques en ce XXIè siècle, et on n’a pas l’impression de subir le discours marketing pré-mâché sclérosé des habituels représentants du monde du jeu vidéo. Bon point.
Les Grandes Gueules ; c’est d’ailleurs le nom d’une célèbre émission de RMC, à laquelle J.-C. Larue a participé, et dont je m’en veux un peu d’avoir oublié de mentionner l’existence dans mon précédent article. Dommage, car cela permet (à mon avis) d’affiner un peu la vision que l’on peut avoir du personnage : ainsi, si j’évoquais la politique anti-piratage agressive du SELL dans les années 90, je ne peux résister à l’envie de poster une petite vidéo datant de 2009, histoire de faire contre-poids. Dénichée sur le site de RMC, dans un contexte Hadopiesque, elle montre Larue invitant son interlocuteur à trouver de « nouveaux modèles » économiques plutôt que de mener une simple chasse aux pirates.
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Mais revenons à mos moutons. J.-C. Larue se montre tout de suite ouvert et sympathique, n’hésitant pas à reconnaître mon travail de documentation dans le billet à l’origine de tout, même si il ne s’y « reconnaît absolument pas ». Il est vrai que, malgré sa notoriété certaine, il demeure encore difficile de trouver beaucoup d’informations sur lui. Preuve en est, il m’apprendra avoir mené ses premiers combats en tant que syndicaliste UNEF, il y a 50 ans de cela — une info certes anecdotique, mais à la lumière de laquelle mon analyse originale aurait peut-être été sensiblement changée…
Sans renier ma prose initiale, qui faisait complètement sens au moment où elle a été rédigée, je ne peux pas m’empêcher de mieux comprendre quelques-uns de ses combats, à la lumière de ce rendez-vous. Si l’on peut arguer des méthodes, J.-C. Larue n’en œuvre pas moins pour le jeu (je parlais de « lobbyiste convaincu » dans mon billet original) et on peut en apercevoir les résultats ; ainsi, il évoquera avec moi la création de la signalétique européenne PEGI, le crédit d’impôt accordé aux développeurs de jeux vidéo en France…
L’homme a une vision politique intéressante et censée, qui me parle beaucoup : il confesse que le jeu vidéo en France n’a pas toujours été bien perçu au sein des hautes sphères, et semble presque le relater comme un échec personnel. « Pourquoi, en France, seuls les jeux vidéo considérés comme ‘culturels’ bénéficient d’aides ? Est-ce que l’on demande la même chose à un film ? » lâche-t-il — tout joueur digne de ce nom se retrouvera certainement dans ce discours, face au bullshit gouvernemental et son obsession du Serious Gaming. Récemment, un début de terrain d’entente pour une meilleure valorisation des jeux vidéo en France semble avoir été trouvé avec le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand ; Larue évoque les progrès en la matière, ainsi que l’exposition Game Story au Grand Palais. Mais le pessimisme face aux rapports entre jeu vidéo et pouvoir semble de mise : « on en profite » tant que l’on peut, explique-t-il, ne sachant pas du tout si les successeurs futurs du ministre seront aussi ouverts à la cause du gaming…
En ce qui concerne le Paris Games Week, force est de constater qu’une bonne partie des reproches que j’évoquais l’année précédente semblent avoir été gommés pour l’édition 2011 : ainsi, l’opposition entre salons n’est plus de mise, Jonathan Dumont (Games-Fed, ex-organisateur du Festival du Jeu Vidéo) ayant rejoint l’organisation du PGW tandis que Micromania met cette année en avant son Micromania Game Tour. Presque deux fois plus grand que l’année précédente (et aux allées plus aérées, c’est promis !), le salon accueillera désormais l’association MO5.com ou de plus petits studios de développement — ceux-ci avaient préféré se rendre au FJV l’année dernière, déclinant l’invitation du PGW, raconte J.-C. Larue. Le parcours pédestre familial, très apprécié l’année précédente, est remplacé par un espace 100% famille, situé à l’entrée du salon. Et encore tout plein de choses que j’oublie — foncez voir le site officiel !!
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En bref, si la première édition n’était pas parfaite, la seconde promet de tirer des leçons de l’année passée, et c’est déjà un grand pas. On fait volontiers amende honorable : après tout, l’E3 ne s’est pas fait en un jour, pas vrai ? Toute l’équipe de CG sera bien évidemment sur place pour vous en dire plus, du 21 au 25 octobre 2011 ; comptez sur nous pour vous donner notre avis sans langue de bois, avec toujours une bonne dose de lol.
De mon côté, je remercie Jean-Claude Larue de m’avoir spontanément invité, et joliment prouvé que la tête de mule que je suis pouvait s’être trompée sur certains points. Dont acte ! Et, il faut bien le dire, chez Café Gaming, les grandes gueules, au fond, on aime bien ça… 😉
Article vraiment très intéressant qui soulève pas mal de zones d’ombre. Par contre il reste encore un point que tu n’as pas éclairci (ou qu’il ne t’a pas détaillé), je croyais que M. Larue avait démissionné du SELL, il fait quoi maintenant ?